Tuesday, 13 November 2012

Une interview de Charles Blé Goudé: Situation socio-politique, procès du président Gbagbo, faux complots de Ouattara


Par Yacouba Gbané     Titre : abidjan_pas_net

Suivez la dernière interview de Charles Blé Goudé accordée à Yacouba Gbané de LG infos à propos de l’actualité brûlante.

Charles Blé Goudé  être populaire ne saurait être un critère de maintien en détention d’un leader

La cour pénale internationale soutient que le Président Laurent Gbagbo peut comparaître…

CBG : Rien ne me surprend

Les juges soutiennent qu’il est trop populaire. Et qu’il a un réseau puissant, il peut fuir et peut revenir au pouvoir. Qu’en dites-vous ?

CBG : Gbagbo est un empêcheur de tourner en rond qui dérange le système international. Si non la démocratie étant la loi du nombre, avoir de nombreux partisans et être populaire ne saurait être un critère de maintien en détention d’un leader. Bien au contraire, cela signifie que Gbagbo est porteur d’un projet de société auquel adhèrent de nombreux ivoiriens et africainsIl faut que les partisans de Gbagbo, nous comprenions que notre leader est détenu et maintenu à la Haye afin que Ouattara est le temps de mieux maîtriser les leviers de son pouvoir pour ensuite changer et modifier le paysage politique de notre pays. Ouattara et ses amis veulent créer chez les pros-Gbagbo une situation de troupe sans capitaine. Nous devons quitter le stade de l’euphorie et faire preuve d’analyses froides puis redoubler de vigilance.


Et pourtant les experts médicaux de la Cour soutiennent qu’il a été torturé…

CBG : Tous ces rapports médicaux n’intéressent en rien la CPI. Croire au contraire serait faire preuve d’une cécité politique.

Est-ce que la Cpi ne donne pas raison à ceux qui pensent que le procès du Président Gbagbo est un règlement politique ?

CBG : Nombre d’observateurs décrivent la CPI comme une cours créée par les grandes puissances et qui a pour rôle de donner un vernis juridique aux règlements de comptes politiques contre tous ceux que les maîtres de ce monde auront identifiés comme obstacle à leur politique d’hégémonie. Au moment où je vous accorde cette interview la CPI n’a encore posé aucun acte qui puisse contredire les tenants de cette thèse. La CPI nous fait comprendre le plus simplement du monde que nous avons perdu la guerre, par conséquent c’est nous et nous seuls qui devons être jugés, comme l’Allemagne l’a été à Nuremberg après avoir perdu la guerre mondiale. Le procès de Gbagbo à la CPI est le prolongement de la parodie de justice qui se déroule à Abidjan où on juge Dogbo Blé , Vagba Faussignon, Kipré , de jeunes lieutenants et soldats des FDS, alors que le chef d’Etat-major et le commandant supérieur de la gendarmerie sont nommés ambassadeurs. Aidez-moi à comprendre cette démarche s’il vous plaît, car ma jeune intelligence en souffre. L’on gèle les comptes de certaines autorités qui sont aujourd’hui derrière les barreaux pour crime économique, pendant que le principal argentier de Gbagbo qui était Jacques Anouma est en liberté et jouit de ses comptes. Si l’on considère que celui qui a gagné la guerre a fait plus de victimes que celui qui a perdu, pourquoi tous les chefs de guerre pro Ouattara sont-ils encore en liberté? Pour même narguer la communauté internationale, Ouattara leur donne davantage de pouvoir en les nommant. Dois-je vous faire un dessein?

Qui a intérêt à ce que le Président Laurent Gbagbo ne soit pas libéré

CBG : Ceux qui ont bombardé sa résidence, l’ont fait arrêter et l’ont emprisonné.

Partagez-vous l’avis de ceux qui soutiennent que la Cour pénale internationale est dans la tourmente sur le dossier de Gbagbo ?

CBG : Quelle tourmente ? Comment les gens peuvent-il penser qu’une cours qui mène à bien une mission qui lui a été confiée est dans la tourmente. Ne nous y trompons pas, la CPI n’a de compte à rendre qu’à ceux qui l’ont conçue et lui assurent les moyens pour son fonctionnement. Pourquoi devrait-elle être dans la tourmente? Si les gens le disent par rapport au procès de Gbagbo, ils se trompent. Nous ne devons rien attendre de la CPI. Même le plus grand juriste du monde ne pourra pas faire libérer Gbagbo. C’est la politique qui a conduit Gbagbo à la Haye, c’est la politique qui le sortira de là. Nous ne devons rien attendre de la CPI. Toutes ces audiences participent à animer la cour. Concentrons-nous, entrons en nous pour sortir le meilleur de nous-mêmes, organisons nous, structurons nous encore mieux, mobilisons-nous, ainsi notre chef nous reviendra. C’est pourquoi je félicite la diaspora ivoirienne et africaine qui bat le pavé pour faire entendre notre cri de douleur. Je ne doute pas du retour de Gbagbo. Quand et comment, là demeure l’interrogation.

Il se raconte que le Président Gbagbo refuserait d’accepter l’exil…

CBG: L’incarcération d’un leader est toujours une occasion de tractations politiques. La nuit Mandela sortait de prison pour des négociations et on l’y ramenait. Cela a mis du temps mais aujourd’hui, le résultat est là. Nos adversaires me diront encore que je rêve, mais c’est justement parce qu’ils ont eux-mêmes rêvé et cru en leur rêve qu’ils sont au pouvoir aujourd’hui. À la Haye, il y aura beaucoup de tractations. Restons sereins car celui qui s’y trouve est un grand homme qui accorde peu d’importance à la liberté physique de sa personne, Gbagbo est engagé dans un combat pour un idéal et non pour un pouvoir. Voilà la différence entre lui et ses adversaires.

Des journaux proches du pouvoir racontent que vous êtes en train de négocier votre retour…

CBG : Si vous vous amusez à rassembler tout ce que les journaux proches du pouvoir racontent à mon sujet depuis que je suis exil, il y a de fortes chances que vous publiez un livre plein de contradictions. Après avoir fait mes funérailles, ils m’annoncent en Gambie, en Afrique du Sud, dans une rébellion au Libéria, dans des réunions avec Ansar Dîne, ils disent maintenant qu’ils parlent avec moi et aujourd’hui la nouvelle trouvaille est que je négocie mon retour. Si je leur manque qu’ils l’expriment clairement, je vais étudier le dossier. Si non je répète encore à qui veut l’entendre, nous avons perdu le pouvoir mais pas notre intelligence. Pour le reste, je ne le sens nullement concerné.

Ils disent que tout est fin prêt. Il reste quelques détails à régler…

CBG : Qu’est ce qui est fin prêt et quels sont ces fameux détails que je suis curieux de savoir?

Il n’y a pas de fumée sans feu…

CBG : Bien sûr qu’il peut y avoir de la fumée sans feu. Que faites-vous de l’évaporation des rivières en temps de canicule? Arrêtez de voir le feu partout. Dans mon cas et à partir de ce que je lis souvent à mon sujet, j’en suis arrivé à la conclusion qu’il existe bel et bien de la fumée sans feu.

Ces journaux ont quel intérêt à dire de telles choses ?

CBG : Juste pour faire de belles “UNES” et abuser des lecteurs.

Ils disent que vous êtes en route ?

CBG : Je leur demande de me mettre au moins en l’air au lieu de me mettre en route. Je mérite au moins de monter dans un avion, ou bien? Rire!!! Je leur manque tellement qu’à défaut de m’avoir avec eux ils tentent même de fabriquer quelqu’un à mon image. C’est un exercice très difficile. Je suis un politique et les raisons qui me feront revenir dans mon pays seront politiques. Je respecte tellement les ivoiriens que je ne compte signer aucun accord en cachette au détriment de notre lutte et de notre dignité. Mais quand vous êtes au-devant d’un combat, chacun se croit obligé de raconter au moins quelque chose sur vous pour se faire valoir auprès de son patron,

Quels commentaires faites-vous sur le rapport de l’Amnesty international qui dénonce les tortures et les enlèvements des pro-Gbagbo ?

CBG : Je les félicite et je les encourage à faire pression sur le régime afin que soient restitués et respectés les droits élémentaires des ivoiriens.

Le Conseil de sécurité, les Etats-Unis, l’Union européenne sont également sans pitié pour le régime sur la même question…

CBG : Il ne faut pas donner un chèque en blanc à ce pouvoir. Ce serait livrer la population aux exactions. Ils se sont donné le temps d’observer, maintenant ils réagissent et c’est bon. Je ne crois pas que la communauté internationale ait mis autant de moyens logistiques, financiers et humains dans la crise ivoirienne pour installer une dictature des temps. Est-il besoin de vous dire qu’en Côte d’ivoire, nous sommes dans un pays de non droit ?

Certaines personnes sont surprises de leurs réactions surtout que ces derniers ont pris position pour ce régime contre Gbagbo…

CBG : Laissons ces organisations internationales pratiquer ce régime et découvrir par leur propre expérience, sa vraie nature.

Que pensez-vous de Zady Djédjé qui se réclame le fer de lance de la jeunesse pro Gbagbo ?

CBG : Je ne pense rien de lui. Il n’est ni responsable ni militant du Cojep, par conséquent il n’a pas qualité à agir et parler en mon nom. Ce que zadi Djedje dit et fait ne m’engage pas. C’est un jeune homme avec qui le pouvoir a décidé de folkloriser et qui se débrouille pour survivre. Parlons des problèmes des ivoiriens s’il vous plaît.

Et pourtant il dit qu’il se bat aussi pour la libération du siège du COJEP, qu’en dites-vous?

CBG : La libération du siège du COJEP reste l’affaire du COJEP. Nous sommes assez intelligents pour comprendre que l’on veut nous livrer ce siège que les FRCI occupent depuis plus d’un an et demi, pour ensuite venir faire une perquisition et nous accuser de détenir des armes. Nous ne voulons plus de ce siège. Nous irons voir ailleurs. Nous n’avons mandaté personne pour mener des démarches au nom du COJEP, en dehors du comité qui est mis en place. Même si son président Yavo martial et le camarade Youan bi sont détenus arbitrairement, il existe des responsables légaux pour engager la voix du COJEP. Nous sommes un mouvement bien structuré.

Etes-vous en contact avec lui?

CBG : Pourquoi le serais-je? La clandestinité que je vis est trop sérieuse pour que je joue à ce jeu. Que l’on évite d’utiliser mon nom et mon image à des fins dont je ne maîtrise pas les tenants et aboutissants.

Il est soutenu par le pouvoir à travers Hamed Bakayoko

CBG : Tout cela relève de l’animation politique. Quand tout ce folklore aura pris fin, le pouvoir discutera avec ses vrais interlocuteurs et fera ce que nous avons publiquement exprimé comme préoccupation pour une réconciliation sincère et franche à laquelle prendront part tous les ivoiriens libres de leurs mouvements. Le Ministre Hamed Bakayoko est dans le rôle qui est le sien; il nous revient de faire preuve de vigilance. La paix et la réconciliation ne se font pas dans le désordre et l’humiliation des autres.

Pendant que le régime interdit les meetings de l’opposition, il accepte les manifestations de Zadi Djedje et lui offre le plateau de 20h.

CBG : Je suis mal placé pour me plaindre d’un plateau de 20h que le pouvoir offre à ses soutiens. Je respecte aussi la position et le choix de ceux qui se prêtent à ce jeu. Mais ils ne sont pas obligés d’y associer mon nom, mon image et le nom du COJEP.

Votre opinion sur la caravane de la paix initiée par les artistes.

CBG : Toute initiative en faveur de la paix mérite d’être encouragée. Il reste que souvent, on peut vouloir faire du bien à un mauvais moment. Et là, on court le risque de ne pas pouvoir se faire comprendre. Je trouve que nos amis avaient de bonnes intentions, malheureusement la méthode a fait défaut. La célébration de la réconciliation par les artistes, doit être à la suite de la signature d’un accord politique entre le pouvoir et l’opposition qui aura permis régler les problèmes (libération des prisonniers politiques, libération des biens mobiliers et immobiliers illégalement occupés par les FRCI, le retour des exilés, la cessation des exactions contre les pro Gbagbo et le dégel des avoirs etc.). On ne peut pas fêter un mariage avant de l’avoir célébré. Il nous faut cependant être indulgent avec nos artistes. Ils ont au moins voulu participer à leur manière, malheureusement ils ont commencé par la fin. Ils ont auront moins égayé les ivoiriens et leur auront donné un peu de bonne humeur. En ce qui concerne la réconciliation, c’est une autre paire de manche qui va au-delà des chansons et des discours. La chanson sur la réconciliation accompagne la décision ou l’acte de réconciliation comme cela a été le cas après la signature de l’accord politique de Ouagadougou.

On a aussi constaté que les salles et stades n’affichaient pas complet.

CBG : C’est certainement à l’image de ce que vivent les ivoiriens. Ceux qui étaient contents sont venus, par contre les opprimés qui auraient souhaité une autre démarche n’ont pas jugé utile de faire le déplacement. Je crois que nous devons saluer le fait que les artistes aient courageusement rendu compte après avoir pris le pool de la situation.

Certains estiment que Yode et Siro, Pat Sako et bien d’autres artistes ont trahi, vous qui êtes connu comme un des mentors du zouglou, qu’elle est votre opinion?

CBG : En dehors de Tiken jah et Meway, j’ai travaillé avec la plupart des autres artistes dont Yode et Siro , Pat Sako, Asalfo etc, Nous sommes de la même génération et nous partageons beaucoup de choses. Je respecte leur position et je m’interdis de les juger et de les condamner. N’oublions jamais que c’est nous qui sommes les politiques et non ceux qui a un moment donné nous ont accompagné dans notre combat comme ils pouvaient. La situation que notre pays traverse est tellement complexe que peut-être ont-ils atteint leurs limites de résistance.

Dans une pharmacie, chaque médicament à sa date de péremption. Depuis un an et demi, nous avons entamé un si long voyage qui est une véritable traversée de désert avec ce que cela comporte comme difficultés. Ne soyons pas surpris qu’à un moment où on s’y attend le moins, certains choisissent leur arrêt pour descendre. Soyons indulgents et apprenons à respecter le choix des uns et des autres. Tout le monde n’est pas obligé d’aller avec nous jusqu’au bout. Je suis reconnaissant envers eux pour nous avoir accompagnés à des moments cruciaux de notre combat au prix de leur vie. Ils rêvent d’une carrière internationale et je prie que Dieu à qui rien n’est impossible de les couvrir de bénédictions et de succès.

Et Alpha Blondy?

CBG : C’est un autre sujet dont on pourra parler un autre jour. Pour l’instant je prends un joker.

Votre mot de fin

CBG : Je dis Yako aux ivoiriens car la situation que traverse notre pays n’est pas du tout facile. C’est le propre de l’histoire, même si aucune nation ne le souhaite. Il nous faudra beaucoup de courage. En ce qui concerne la réconciliation, je conseille au pouvoir d’aborder les problèmes avec courage, point n’est besoin de fuir les réalités qui, quoi qu’on fasse finiront par nous rattraper un jour. Il n’est pas juste de traiter ceux qui demandent la vigilance de « pro Gbagbo qui ne veulent pas la paix ». Pour mémoire, quand Ouattara ne s’était pas rendu à la cérémonie de la flamme de la paix à Bouaké en juillet 2007, était-il contre la paix? Quand toute la direction du RDR, était en courroux contre SORO pour avoir signé l’accord politique de Ouagadougou ; le RDR était-il contre la paix? Ils avaient certainement des préoccupations à ce moment-là; ce qui est notre cas aujourd’hui. C’est pourquoi je demande à certains de nos amis de faire preuve de lucidité. Car la réconciliation n’est pas une condition pour la libération des prisonniers, c’est bien le contraire qui est juste. Alors arrêtons de favoriser le folklore et attaquons nous a l’essentiel.


Source: lg-infos.net

1 comment:

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