Par
Odile Tobner
Le Franc CFA |
Un article de
l'Association "Survie" publié il y a quelques semaines. Un assez bon
concentré d'informations sur l'arnaque que constitue pour les Africains le
Franc CFA, cette monnaie coloniale française. Bonne lecture! Fernand Dindé.
Le
titre du colloque qui s’est tenu le 5 octobre à Bercy sous l’égide du Trésor et
de la Banque de France, «Regards croisés sur quarante ans de zone franc» est
trompeur. En réalité, c’est en 1945 que le franc CFA, franc des colonies
françaises d’Afrique, a été créé.
Ces
pays gardent cette monnaie après les pseudo-indépendances octroyées par la
France, mais la prédation ne pouvant avancer que masquée, CFA signifie
désormais quelque chose comme «communauté financière africaine».
Entre
la France et les États africains de la zone franc sont formalisés, en novembre
1972 pour les États membres de la Banque des États d’Afrique centrale et en
décembre 1973 pour les États membres de la Banque centrale d’Afrique de
l’Ouest, des accords de coopération monétaire qui «marquent le départ de
l’habillage juridique d’une pratique de rente propre à la colonisation» selon
le statisticien camerounais Dieudonné Essomba.
Ces
accords donnent à la France le contrôle de l’économie de ces pays. Ils établissent
une parité fixe entre le franc CFA et le franc français, puis l’euro à compter
de 1999. Le véritable institut d’émission du franc CFA est la Banque de France:
ni la BCEAO de Dakar, ni la BEAC, de Yaoundé ne décident de la masse
monétaire
qui circule dans leurs États:
«Le
franc CFA n’est la créature d’aucun État africain ; il est la créature de
l’État français, il n’est donc que le franc français lui- même»
Citation
tirée, comme les suivantes, de Monnaie, servitude et liberté. La répression
monétaire de l’Afrique (1980), de Joseph Tchoundjang Pouemi (1937-1984)
Enfin
ces États doivent déposer leurs réserves de change auprès du Trésor français,
c’est-à-dire «payer le Trésor français pour garder leurs devises». Surtout le
CFA a permis à la France d’acquérir les matières premières de son empire
colonial avec sa propre monnaie. La garantie illimitée que la France devait en
contrepartie apporter au CFA s’est révélée une «absurdité logique» au mieux, un
mensonge dans le pire des cas. La prétendue parité fixe n’empêcha pas la France
d’imposer, en janvier 1994, une dévaluation de 50% du CFA qui eut des effets
dévastateurs pour les ménages africains. Elle a ainsi divisé par deux sa
facture énergétique africaine, en plein envol du prix du pétrole, tandis qu’elle
multipliait par deux, dans les pays de la zone franc, le prix des équipements
dont ils manquent cruellement.
Rien
d’étonnant que cinq des dix derniers pays en termes de développement humain
appartiennent à la zone franc. Selon le classement de la banque mondiale
elle-même, le Botswana, dénué de ressources, est plus développé que le riche
Gabon. Des pays comme le Cameroun ou la Côte d’Ivoire ont accompli l’exploit de
devenir des pays pauvres très endettés, objet de la sollicitude du club de
Paris. Ce groupe informel de pays développés créanciers de pays pauvres est
présidé par Michel Camdessus, qui fut directeur du Trésor français, gouverneur
de la Banque de France, enfin directeur général du FMI de 1987 à 2000. C’est ce
même Camdessus qui est venu chanter les louanges de la dévaluation de 1994 au
colloque susdit.
Car
en guise de «regards croisés», on n’eut qu’une grand-messe françafricaine,
toutes les interventions portant aux nues le franc CFA. Aucune grande voix
africaine n’est venue troubler ce flot de louanges. Les pères de la critique du
CFA sont morts: Sylvanus Olympio, premier président du Togo, assassiné au
moment où il s’apprêtait à créer la monnaie togolaise, Joseph Tchoundjang
Pouemi, économiste camerounais, «suicidé» peu après avoir publié un ouvrage
décisif sur le sujet.
Le
docile Ouattara, qui a fait toute sa carrière au FMI et à la BCEAO avant d’être
mis par nos armées à la tête de la Côte-d’Ivoire, y a en revanche prononcé un
éloge inconditionnel du CFA, «un atout indéniable», et de ces accords «qui ont
atteint leurs objectifs». C’est le même pourtant qui a été tendre sa sébile
auprès du Club de Paris, arguant de «la pauvreté galopante» et de
«l’insuffisance des infrastructures» dont souffre son pays: c’étaient donc là
les objectifs de la zone franc.
Source:
survie.org
Source :
regardscroises.ivoire-blog.com
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