Par Bernard Desgagné
Nelson
Mandela n’est plus, mais l’injustice est toujours aussi répandue. Source
d’inspiration pour les gens de bonne volonté, le grand homme aura gagné une
bataille importante, mais son combat est loin d’être achevé. La rapacité ronge
l’humanité. Nous pouvons compter sur les valets médiatiques de l’oligarchie
pour ne pas nous l’expliquer.
Nous
endormir est le premier objectif de l’infodivertissement généreusement
assaisonné de publicité qui tient lieu de réflexion dans les sociétés
décadentes du G7. Malheureusement pour la bande d’obscènes propagandistes à bec
crochu qui n’a d’autre principe que le copier-coller et la répétition des
mensonges, au Québécois, nous ne dormons toujours que d’un oeil. Petite mise au
point.
Pour
vendre de la copie ou de la cote d’écoute, le décès de Mandela est
incontournable. Derrière leur pupitre, les manipulateurs experts doivent bien
trouver un moyen de nous en parler sans sortir de leur mandat de
désinformation. C’est ainsi que Radio-Canada, qui a toujours plus de publicité
à vendre pour se financer, trouve dans les vidéos YouTube une aubaine pour
réduire ses coûts de production. Elle nous propose un hommage musical à
Mandela, que les millionnaires de l’industrie de la musique commerciale ont
savamment récupéré, comme ils récupèrent et exploitent les artistes ayant
atteint le seuil de rentabilité.
Puis,
Radio-Canada trouve, quelque part dans les cégeps et les universités, des
Africains ayant compris qu’il ne faut pas ébranler la doxa lorsqu’on aspire à
être coopté par l’oligarchie et à réaliser ses ambitions personnelles. Elle
leur fait dire d’attendrissants lieux communs, et le micro se sauve avant que
ne surgisse, au hasard d’une faculté, une critique gênante du système de
pillage que l’on appelle «économie» dans
certaines capitales.
Sous
la plume des journaleux à gages honteusement rétribués avec nos impôts — et
dont le gouvernement Harper s’emploie d’ailleurs à nous cacher les salaires —,
Mandela devient un «modèle
pour les opposants chinois». Disons surtout qu’il est un prétexte
pour ressasser les mensonges servant à dénigrer la Chine et nous ôter de la
tête l’envie de suivre son exemple. Les sociétés d’État enrichissent le peuple,
mais pas les oligarques, ce qui est très dommage.
Selon
Radio-Canada, Mandela n’est pas un exemple pour les autochtones encore parqués
dans des réserves, au Canada, en 2013, sans eau potable, dans des habitations
insalubres, avec des écoles et des établissements de santé sous-financés.
Ottawa est bien prompt à faire la leçon aux autres, mais quand il s’agit de
mettre fin au scandaleux régime d’apartheid qui perdure sur nos terres, il est
moins pressé.
Radio-Canada
nous propose la vie de Mandela en 10 images ayant reçu le tampon d’autorisation
des censeurs qui veillent à ce qu’elles ne vaillent surtout pas plus de mille
mots. Certains moments du parcours de la légende de 95 ans sont ainsi évoqués.
D’autres le sont moins, car les citoyens pourraient se mettre à penser. Voici
les images que vous propose plutôt Le Québécois, où toutes les vérités sont
bonnes à dire.
Pour
Radio-Canada et les autres antennes de lavage de cerveau, Mouammar Kadhafi
était un paria et Nelson Mandela, une icône. Comment deux hommes aux antipodes
l’un de l’autre peuvent-ils donc être devenus de grands amis? Répondre à cette
question ne fait pas partie du mandat de Radio-Canada, l’un des principaux
complices médiatiques de l’OTAN et de ses affidés d’Al-Qaïda dans le meurtre de
Kadhafi. Rappelons que c’est un général canadien, Charles Bouchard, qui a
présidé à ce meurtre et qu’à son retour de mission, il a été honoré en grandes
pompes par le gouvernement Harper.
En
fait, du temps où ceux qui versent des larmes de crocodile aujourd’hui
accusaient Mandela d’être un terroriste et un dangereux communiste, Kadhafi
s’est porté à sa défense et à la défense des Noirs d’Afrique du Sud. C’est
le «dictateur
libyen», comme aiment à le surnommer ses assassins, qui
réclamait le respect des droits des Noirs du régime raciste protégé par
Margaret Thatcher et Ronald Reagan, deux grands philanthropes comme chacun le
sait.
Plus
de deux ans après le rétablissement de la «démocratie» par la «communauté
internationale» en Libye, ce pays phare de l’Afrique jadis prospère et
respectueux des droits de la personne est livré au chaos le plus total. Il n’y
a plus d’État libyen, et de sauvages bandes armées font régner la terreur.
Quelle belle œuvre de démocratisation de la part du Parlement d’Ottawa, qui a
adopté à la quasi-unanimité — la seule à voter contre étant Elizabeth May — les
motions approuvant la destruction de la Libye! Les valets bleus, rouges et
orange de Bay Street de même que les joyeux lurons du Bloc Québécois ont tous
applaudi le bombardement humanitaire de la Libye.
On
n’a toujours pas retrouvé la trace de la prétendue fortune personnelle mal
acquise de Kadhafi, et on sait depuis longtemps que le prétexte des résolutions
1970 et 1973 du Conseil de sécurité, c’est-à-dire l’imaginaire bombardement des
civils à Benghazi par l’aviation libyenne, était un mensonge. Ce sont ces
résolutions qui ont, en fin de compte, amené la «communauté internationale» à
tuer Kadhafi et à raser la Libye. Mandela avait vivement condamné ce crime de
masse contre l’humanité.
Puisque
Mandela était un méchant communiste, dixit Thatcher et Reagan, il est normal
qu’il ait été un ami de Castro. Mais Radio-Canada ne souhaite pas en parler,
car l’aura de Mandela pourrait donner le gout à des gens de lire Marx. Il est
important, au contraire, que la population continue de se prosterner devant ses
bienfaiteurs, les parasites financiers qui dispensent ses macjobs aux pauvres
mortels que nous sommes et qui n’ont pas leur pareil pour walmardiser
l’économie.
Le
communisme ne doit surtout pas être envisagé comme solution de rechange au
merveilleux système néolibéral dont jouissent les Africains, les Grecs, les
Italiens, les Espagnols, les Portugais et beaucoup d’autres peuples heureux de
vivre dans le «monde
libre».
J’ai
une collègue d’origine hongroise qui s’est rendue dans son pays récemment. À
son retour, elle m’a parlé de la misère de ses proches qui habitent encore
là-bas: «c’était
beaucoup mieux dans le temps du communisme», m’a-t-elle dit.
Parions que Radio-Canada ne lui tendra jamais le micro.
Mandela
a pu enfin sortir de prison quelques mois la chute du mur de Berlin, les
patrons de ses geôliers n’ayant plus à craindre que les Soviétiques donnent de
mauvaises idées aux Africains.
L’un
des plus sordides propagandistes de Radio-Canada est sans doute François
Brousseau. Après la mort de Mandela, il ne voit pratiquement personne à
l’horizon qui puisse succéder à ce monument de l’humanité. Il cherche et
cherche encore et finit par tomber sur quelques favoris des officines de
propagande étasuniennes.
François
Brousseau aime beaucoup Aung San Suu Kyi, cette opposante birmane, coqueluche des
médias occidentaux, qui jouit d’une entière liberté, mais nous est néanmoins
présentée comme une martyre. Toutefois, Brousseau aime moins Victoire Ingabire,
l’opposante de Paul Kagame qui, incarcérée à Kigali depuis avril 2010, subit un
procès politique des plus injustes, aux mains d’un régime génocidaire, dans
l’indifférence de la «communauté
internationale» avide de piller l’Est de la RDC avec l’aide de
Kagame.
François
Brousseau aime beaucoup le dalaï-lama, ce saint agent de la CIA,
mais il aime moins Laurent Gbagbo, qu’il traitait de «tricheur
isolé», en décembre 2010, dans le but de préparer l’opinion
publique au coup d’État sanglant de la «communauté
internationale» en Côte d’Ivoire. François Brousseau et
Radio-Canada ne nous donneront surtout pas le point de vue de Thabo
Mbeki, successeur de Nelson Mandela, à propos de Laurent Gbagbo.
Essentiellement,
ce que dit M. Mbeki, c’est que la «communauté
internationale» s’est fourvoyée royalement en Côte d’Ivoire.
Laurent Gbagbo a remporté l’élection présidentielle de 2010. Il a lutté toute
sa vie pour la démocratie et a respecté la Constitution, les lois et les
institutions de son pays. Il n’a jamais pris les armes. Il a été emprisonné à
maintes reprises pour des motifs purement politiques.
Laurent
Gbagbo ne mérite certainement pas de se retrouver à la Cour pénale
internationale pour y répondre des crimes commis par son adversaire, le truand
Alassane Ouattara, et par les parrains de ce dernier: Sarkozy, Harper et Obama.
À l’instar de la Libye, la Côte d’Ivoire «démocratisée» par la«communauté internationale» est
aujourd’hui livrée à des bandes de pillards et d’assassins, que même les ONG à
gages sont obligées de dénoncer (mais
pas Radio-Canada).
Le
club de criminels qui a regardé pendant 27 ans Mandela croupir derrière les
barreaux, qui a assassiné Lumumba et Sankara et qui a massacré les Ivoiriens et
mis Gbagbo en prison, sera forcé de reconnaître un jour que le digne héritier
de Nelson Mandela est Laurent Gbagbo.
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