par Ange-Marie Ibo Djêgba (
Ce n’est pas une fable ; votre quotidien a été l’un des tout premiers à annoncer dans une série d’articles depuis septembre, un coup d’Etat planifié contre la Côte d’Ivoire. Certains ont pris ces informations pour crédibles, d’autres en revanche, par un raccourci navrant, ont qualifié nos informations d’affabulatoire : fort heureusement, presque à 80%, la suite des événements nous ont donné raison, hélas !
Aujourd’hui, nous pouvons dire que nous Ivoiriens n’avons pas su faire une bonne lecture des faits et anticiper comme cela se devait. Bien au contraire, nous avons été pris au piège comme mystiquement aveuglés par Soro et Ouattara, d’un côté et par la France, de l’autre. Les uns et les autres ont su vraiment cacher leur jeu.
En effet, ce coup d’Etat ourdi sous Chirac contre le Président n’a jamais cessé de fonctionner jusqu’à aujourd’hui. Comme le disait le poète dramaturge Racine dans sa pièce Phèdre, notre mal vient de plus loin. Et pourtant, tout était visible, clair comme de l’eau de roche :
Cette présence incongrue de la Force Licorne fixée comme un kyste aux Forces de l’Onuci, aurait dû nous interpeller. Une seule raison à nos yeux justifiait cette présence, c’est la thèse du complot néocolonial contre Laurent Gbagbo, l’homme à abattre, arrivé à la tête de la Côte d’Ivoire comme un cheveu sur la soupe pour la Françafrique. En effet, pour les tenants de la Françafrique, n’arrivent au pouvoir d’une manière ou d’une autre dans le pré-carré français, que seuls ceux, adoubés par eux. Pourtant, Laurent Gbagbo n’est pas des leurs. Il arrive au pouvoir par son sens de l’histoire et la volonté du peuple à qui appartient la souveraineté. Un de nos confrères occidentaux nous disait sans sourire, « Gbagbo au pouvoir » est un accident de l’histoire. Notre repartie ne s’est pas fait attendre = « réussir à l’empêcher d’être au pouvoir aurait été non seulement un déni de la souveraineté du peuple ivoirien, mais aussi une dénégation de l’Histoire ».
En réalité, il y avait un plan en cours qui envisageait sa non- participation même à une élection. C’est pourquoi, nous sommes appelés à bien analyser le premier indice, le symbole de la Licorne en Côte d’Ivoire. (Voir texte +image). Pour la Côte d’Ivoire, les éléments de la Licorne sont de la 3e compagnie du 1er Rcp ( ). Les armoiries sont composées de la carte du pays (un quadrilatère enserré dans un triangle isocèle, reposant sur un trône fait de trois têtes couronnées.
A regarder de près, ces têtes sont des éléphants, ennemis jurés de la Licorne selon la mythologie. Pis, de leur combat épique, la Licorne est toujours le grand vainqueur. Seulement le mythe n’a jamais représenté un éléphant tué, même piétiné ou terrassé par la Licorne. Donc, soyons tranquilles. Le plus grave dans l’armoirie de la Licorne de Côte d’Ivoire, c’est que ces 3 éléphants sont transpercés verticalement par 2 poignards commandos à leurs flancs. Tout une symbolique exprimant les desseins cachés de cette mission.
Tout porte à croire que la vraie mission de la Licorne, était d’éliminer le trio connu de la politique ivoirienne = non seulement Laurent Gbagbo, mais aussi Bédié et Ouattara ! Mais au profit de qui ? C’est le troisième homme, celui-ci bien tapis dans l’ombre comme l’ont recommandé les maîtres du complot. A plusieurs reprises, sous Bédié, sous le Gal Guéi, ils ont fait des tests de capacité pour voir si l’homme était à la hauteur. En réalité, l’Homme est l’un des leurs. Qui est-il ? Où est-il ? Pourquoi lui ?
II / Le troisième homme :
Longtemps, la France dans le cadre de la Françafrique a cherché parmi les militaires ivoiriens, au cas Houphouët-Boigny serait défaillant un jour, un homme capable d’être une possible relève.
Ils ont d’abord misé sur un brillant officier, éminemment intelligent, surtout fruit des grandes écoles et grandes académies militaires françaises. Il s’agissait de Lamine Fadika, de la marine ivoirienne, tout comme à Madagascar, ils ont aussi misé sur Didier Ratsiraka, lui aussi officier de la Marine. C’était connu, la Marine a toujours été la fine fleur intellectuelle et militaire de la Françafrique. Les officiers avaient à leurs yeux, toutes les qualités requises pour être des bons substituts à la vieille garde des années d’Indépendance. Malheureusement, tous les pays du précarré n’en possédaient pas, surtout ceux de l’Hinterland.
Lamine Fadika était donc le prototype idéal pour une transition en douceur entre la vieille garde, sans gros risque, sans grand remous, car l’homme comme disent les Américains est un «well educated» sur tous les plans.
Un jour, Lamine après une brillante conférence au Centre culturel français sur l’importance des mathématiques et leur implication dans la vie de tous les jours, conférence dont les répercussions ont dépassé nos frontières africaines, a éveillé chez le vieux renard Houphouët-Boigny des soupçons velléitaires, illégitimes ou légitimes ? Là n’était pas la question.
Houphouët ayant une peur bleue des éminences grises, le rapprocha de lui. Pour mieux l’étouffer (la tactique du serpent boa), il le nomma ministre de la Marine avec en prime, une ascension fulgurante au sein du parti unique. Une ascension à la fois enviée et jalousée.
Pour ensuite entamer une descente aux enfers quand l’homme fort de la Marine fut coupé de sa base militaire et écrasé dans la marre politique où ne pataugeait pas qui veut mais qui avait la bénédiction du patriarche. A la fin des fins, Lamine Fadika n’était plus que l’ombre d’un potentiel successeur.
Après lui, la Françafrique jeta son dévolu sur un jeune officier de la Gendarmerie qui a pris les commandes de cette Institution avec le grade de capitaine passé pour la circonstance commandant…officier supérieur, sans peur, ni reproche à l’époque, comme le chevalier Bayard, Ouassénan s’imposera par sa rigueur militaire.
Houphouët voyant venir les manigances et le jeu voilé de la Françafrique concernant cet officier général très entreprenant et très en vue, employa la même tactique que pour le premier en le nommant ministre de la Sécurité intérieure pour le sortir des rangs. En Afrique, ne dit-on pas que pour sauver son enfant unique des griffes des sorciers mangeurs d’âme, il vaut mieux le leur confier.
Houphouët lui ayant confié la sécurité du pays, il s’y employa avec une rigueur qui frisait le zèle. Mais les Français et le gotha politique ivoirien à la fois, effrayés par l’esprit d’indépendance de l’homme, se sont vite rendu compte de part et d’autre que l’homme n’était ni malléable, ni maniable.
Très inflexible sur l’ordre et la discipline, il ne pouvait faire ni l’affaire de la Françafrique ni d’Houphouët. ce dernier résolut son problème en l’envoyant comme ambassadeur en Argentine, où il résida plusieurs années sans avoir été appelé, ne serait-ce en consultation Finalement excédé par la situation, il rentre au pays et se consacre à sa région et au parti unique. Mais devant son intransigeance à vouloir toujours se montrer inflexible sur des principes devant son ainé Thomas d’Aquin, Cema à l’époque, il fut victime des querelles soulevées et machiavéliquement animées par le vieux Renard Houphouët. On le banalisa à tel point qu’on se demandait si l’homme aurait encore quelque chose à revendre dans ce pays.
La Françafrique a vite compris qu’il n’était pas officier idéal pour elle en cas de décès subit d’Houphouët. L’homme portait ses frasques du pays Guébié qui lui collaient à la peau comme une marque indélébile. Des choses qui pouvaient ressurgir à tout moment avec la machine à remonter le temps.
Elle devait encore chercher un autre cheval de Troie car au plan civil, sur les capacités à gouverner ce pays, ce n’était pas le manque de ressources humaines qui était un handicap, mais plutôt le trop plein d’hommes aptes qui posait problème pour trouver un substitut au vieux Renard :
Alors que Moussa Traoré, un officier subalterne promu colonel et général en grillant toutes les étapes de la hiérarchie militaire régnait sans coup férir sur le Grand Mali, ici en Côte d’Ivoire, non seulement dans la vieille classe quelques hommes politiques étaient en mesure d’imposer d’une manière ou d’une autre leur autorité, mais des jeunes loups souvent aux dents longues qui attendaient dans l’antichambre depuis belle lurette une quelconque opportunité en pouvaient en faire autant : ce sont les Sery Gnoléba, feu Bra Kanon, Emmanuel Dioulo, Bédié lui-même à l’époque, Fologo… tous susceptibles ou capables de donner une nouvelle impulsion à la vie politique ivoirienne…
La Françafrique a eu d’ailleurs du mal à se retrouver à la mort d’Houphouët-Boigny. Il fallait parer au plus pressé et bloquer la vieille garde en peine, de toute velléité successorale, et maîtriser un homme qui est arrivé comme un éléphant dans un magasin de porcelaine, ou un chien dans un jeu de quilles : Alassane Dramane Ouattara.
Pour éviter le vieux lion Yacé Philippe, usé et malade et des jeunes loups incontrôlables, elle s’en remet provisoirement à la Constitution qui faisait de Bédié, le dauphin présomptif. Il fallait tuer le poussin dans l’œuf, en évitant la soldatesque vieillissante et sans ambition réelle. Henri Konan Bédié n’était pas l’idéal, mais constitutionnellement il était l’homme de la situation.
Sans pour autant être désemparée, la Françafrique continua de chercher quand subitement survient la révolution des flamboyants, avec les jeunes gens de Robert Guéi, soigneusement préparée dans les locaux de Chocodi avec Seydou Diarra et un jeune loup du nom de Patrick Achi collaborateur zélé, venant tout droit de chez Arthur Anderson. La Françafrique a eu du mal à pouvoir transformer le Général Guéi.
Mais elle ne désespère pas de trouver l’homme idéal pour conserver sa mainmise sur la Côte d’Ivoire. Sous le règne éphémère de Bédié donc, elle recrute ou confirme peut-être un officier supérieur, alors jeune taciturne, apparemment discret sans l’être, et mystérieux ministre avec de grandes ambitions politiques.
Confirmer ou recruter, cet officier n’était pas un simple contact, mais un agent de l’ombre pour leur compte. Il était chargé de surveiller les moindres gestes et faits du nouveau Président Bédié pour le compte de la France.
La Françafrique ne voulait pas du tout de Ouattara à l’époque (Camdessus avait du mal à l’imposer au cercle secret des politiques français), elle trouva deux officiers généraux Coulibaly et Palenfo pour jeter leur dévolu sur ces derniers. Mais leur soumission aveugle à la cause de Ouattara qui n’était pas non plus l’idéal pour elle, les inquiétait. Elle décide donc de se servir d’eux, sans en faire de potentiels chefs de pouvoir. Les Français prirent leur temps pour préparer leur nouvelle trouvaille, tant sous la transition du Gal Guéi que sous Laurent Gbagbo.
De temps en temps, on le poussait à des essais d’outrecuidance montrant ses velléités de présidentiable qui se soldaient par des rétractations attendues. S’il sortait la tête de l’eau pour un instant médiatique, c’était pour replonger tout de suite après. Sa communication qui est menée avec dextérité de main de maître est uniquement du ressort de la Dgse.
En fait, lui sait, (pour revenir à la symbolique de l’élimination des 3 dinosaures de la politique ivoirienne) que les Français s’employaient à nettoyer le terrain pour lui. Nous l’avons écrit, nous le confirmons l’évidence est là ; Bédié est sorti du jeu ; Alassane Ouattara sera le mouton de sacrifice très bientôt, le seul hic est Laurent Gbagbo qui tient fort bien la barre avec l’appui du peuple ivoirien.
Un premier éléphant éliminé (voie de garage politique définitive pour Bédié), un second, Alassane Ouattara sera, lui sacrifié sur l’autel des intérêts de la Françafrique sans état d’âme. Maintenant comment faire pour débusquer Laurent Gbagbo ? C’est l’os à travers la gorge.
Le troisième homme assidûment fréquenté par la Force Licorne au niveau des officiers du contingent qui ne s’en cachent pas, attend en rongeant ses freins, et en se faisant de plus en plus discret dans les prises de position, n’est personne d’autre que le Colonel Major Constant Bombet, très constant dans ses attitudes et ses ambitions. Il est temps que la classe politique le comprenne car un pan de voile est levé par votre journal. Ceux qui s’excitent au niveau des Etats de la Cedeao pour le départ, l’ignorent quasiment. Ils sont tout aussi manipulés que Ouattara.
Ange-Marie Ibo Djêgba
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