Monday 4 July 2011

La destruction quasi-méthodique des PME et PMI ivoiriennes par les forces pro-Ouattara vise à remettre en selle les patrons hexagonaux

 par Philippe Brou

Les entrepreneurs ivoiriens doivent-ils, d’ores et déjà, faire le deuil de leur pays et s’en aller investir sous des cieux moins «monopolisés» ? La question ne saurait être éludée. En effet, depuis l’arrivée au pouvoir d’Alassane Ouattara, de nombreux patrons de PME nationaux (Ivoiro-Libanais compris), ont l’impression qu’une sorte de vaste initiative visant à remettre en selle le capitalisme français en Côte d’Ivoire menace à la fois leurs intérêts et l’équilibre économique du pays.


ADO fait déjà des cadeaux

Les pillages perpétrés par les FRCI ont coûté très cher au secteur privé ivoirien. Jean Louis Billon, président de la Chambre de commerce et d’industrie, a évoqué 400 entreprises en faillite et 120 000 emplois détruits par la «bataille d’Abidjan». Jean Kacou Diagou, «patron des patrons», a quant à lui évoqué 30 milliards de pertes dans le seul secteur de la téléphonie. La quasi-totalité des stations-services de communes comme Yopougon et Cocody ont été soit «occupées» et vidées de leur contenu, soit pillées.


Des agences de compagnies de transfert d’argent et des usines ont subi la furia des hommes en armes venus se payer sur le dos de la bête. Les petits patrons broient du noir, les entreprises nationales n’ont aucun espoir.

Fragilisées et inquiètes, les banques peinent à refinancer les PME qui ont perdu tout ou partie de leurs stocks ou de leur outil de travail.

Dans ce contexte de grande déprime, les patrons français voient la vie en rose. Et pour cause : ils sont bichonnés par leur gouvernement – ce qui est normal – mais aussi par les autorités ivoiriennes, qui leur font divers «cadeaux». Quand les entreprises françaises voient leurs voitures ou leur matériel volé par les hommes en tenue, les autorités consulaires se mettent en branle et mettent en branle le gouvernement ivoirien. Très souvent, au final, les objets volés sont restitués. Ce qui n’est absolument pas le cas pour les entrepreneurs ivoiriens, qui sont rabroués ou soumis à diverses méthodes de brigandage dans les commissariats.

Au point de vue strictement financier, le gouvernement ivoirien se signale par un sens des priorités révélateur. La Lettre du Continent traduit cet état d’esprit particulier.

«C’est l’honneur de la France que d’avoir participé à la chute de Laurent Gbagbo (…) Prenez la part qui vous revient dans le programme d’Alassane Ouattara», a ainsi claironné Aly Coulibaly, ambassadeur de Côte d’Ivoire à Paris, lors d’une rencontre avec les patrons membres du Conseil français des investisseurs en Afrique noire (CIAN). Pour bien montrer que les choix économiques de l’Etat de Côte d’Ivoire relèvent d’abord d’une logique de «récompense». De son côté, Charles Diby Koffi est invité à mettre la main à la poche. En donnant six milliards de FCFA aux patrons français à titre de dédommagements pour les conséquences de novembre 2004. De son côté, Bercy doit mettre la même somme sur la table…


Les FRCI volent les des « corps habillés » une entreprise française en livre d’autres.
Plus stratégique : l’Etat français va financer ses entreprises en Côte d’Ivoire grâce à un contrat de désendettement développement (C2D). Les impôts de toutes les entreprises vont financer, au titre de la renégociation de la dette bilatérale, les firmes françaises qui seront chargées de mettre en place un programme de réhabilitation des infrastructures, déjà préparé tambour battant.

Dans le BTP par exemple, les Ivoiriens ou les autres acteurs n’ont plus qu’à s’associer à des Français ou à disparaître…
Paris profite déjà du désordre incroyable créé – de manière volontaire ? – en Côte d’Ivoire. Les FRCI ont-elles pillé les commissariats, ramassant les uniformes des «corps habillés» officiels ? Pas grave !

Une société française, du nom de Marck, va se charger de renouveler tout cela. Un «méga-contrat», assure La Lettre du Continent. Quand on sait que des entreprises locales ont déjà fourni l’armée en treillis et que les entreprises textiles turques et asiatiques sont bien plus compétitives que les firmes occidentales, on est en droit de se poser quelques questions… La destruction quasi-méthodique du tissu des petites moyennes entreprises et petites et moyennes industries ivoiriennes servirait-elle à remettre en selle les petits patrons hexagonaux qui ont quitté le pays ces dix dernières années et qui peuvent désormais revenir, sous le parapluie de la Force Licorne, de l’Agence française de développement et des banques commerciales bleu-blanc-rouge plus que jamais au centre du jeu ?

In Le Nouveau Courrier 

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