Tuesday, 14 December 2010

Face à l'impérialisme, l'avenir de l'Afrique se joue à Abidjan

par D. Atangana in Dikalo (Cameroun)


Quel jeu se livre la communauté internationale dans un continent déjà meurtri par de nombreux conflits ?

Toutes les conditions étaient-elles réellement réunies pour organiser des élections démocratiques en Côte d'Ivoire ? Les résolutions prises par le Conseil de sécurité de l'Onu pour sécuriser le pays des Eléphants ont-elles été respectées et appliquées ? La communauté internationale a-t-elle aidé la Côte d'ivoire dans ce sens ? En réalité, les rebelles regroupés au sein des Forces Nouvelles n'ont jamais été désarmés. Leurs milices continuaient à avoir la mainmise sur toutes les zones fidèles à Alassane Ouattara. L'erreur de Laurent Gbagbo aura été d'accepter d'aller aux élections dans un pays divisé et contrôlé partiellement par une rébellion soutenue par un soi-disant médiateur appelé Blaise Compaoré qui est subitement devenu muet depuis l'enlisement de la crise.

Ce qui s'est passé dans le Nord pendant et après l'élection présidentielle du 28 novembre 2010 est inacceptable dans un Etat républicain et souverain: villages et maisons incendiés, des citoyens pro-Gbagbo amputés de leurs membres, des doigts sectionnés à la machette; des procès-verbaux signés sous la menace des armes, des urnes bourrées quand elles n'étaient pas tout simplement emportées. Voilà les leçons qu'il faut retenir des élections voulues à tout prix par la communauté internationale. Vous comprendrez donc pourquoi, dans ces conditions de terreur, le consensus était quasi impossible entre les membres de la commission électorale indépendante. Ils avaient validé les P.V de 14 régions sur 20.


La Terreur

Il en restait six à l'origine du blocage et du retard accusé par rapport au délai imparti pour la proclamation des résultats. C'est dans cette discorde que la CEI a prononcé les résultats provisoires, non pas au sein de son siège, mais dans les locaux abritant le quartier général du candidat Ouattara en l'absence de certains médias. Ce sont bien des chiffres provisoires. Les définitifs étant du ressort du Conseil constitutionnel.

Au nom du respect des principes universels de la démocratie, quel homme d'Etat en Afrique peut-il rester indifférent face à un tel hold-up ? C'est bien beau de demander à Laurent Gbagbo de quitter le pouvoir, de l'accuser de vouloir s'accrocher au fauteuil présidentiel après des conclusions hâtives sur la transparence du scrutin, a-t-on disséqué le fond du problème ?
La Coordination des experts électoraux africains, CEEA, était sur le terrain des confrontations. Elle a déployé 38 observateurs internationaux issus de sept pays africains dans les localités de Korhogo, Bouaké, Katiola, Séguélé, Yamoussoukro et Abidjan, le jour du scrutin. Le rapport qu'elle dresse à l'issue de ces observations est édifiant: «vol des urnes, séquestration des représentants et délégués des candidats, votes multiples, refus systématique de la présence des observateurs internationaux dans certains bureaux de vote à l'heure du dépouillement des bulletins et pertes des vies humaines».

Un terrorisme électoral digne des républiques bananières. Au lieu de condamner avec la dernière énergie ces irrégularités qui ont dépouillé ce scrutin de toute coloration démocratique, la communauté internationale s'acharne sur le président sortant, au mépris des institutions de cet Etat souverain et guidé par le jeu des intérêts qui régissent les relations internationales. Le pays de feu président Houphouët Boigny n'est-il pas le premier producteur mondial de cacao.

La force du droit

Mathias Eric Owona Nguini est politologue. Il a jeté un regard sur la crise ivoirienne dans l'édition du quotidien Mutations du 06 décembre 2010. Son analyse est claire «du point de vue de la rationalité constitutionnelle, la décision d'un organe suprême de régulation constitutionnelle acquiert l'autorité de la chose jugée. Le Conseil constitutionnel se prononce en dernier ressort, et cela n'offre aucun recours juridique supplémentaire aux parties qui s'estiment défavorisées par une telle décision. La CEI ne proclame pas les résultats de l'élection présidentielle. Elle compile, recense et vérifie les résultats sur la base d'un examen scrupuleux des procès-verbaux. On ne peut donc pas, meme lorsqu'on estime qu'il y a eu des erreurs substantielles ou de fraudes, considérer que le processus de proclamation des résultats est achevé quand la CEI a annoncé ses résultats pour la simple raison que ces résultats ne sont pas encore valides. Et ils ne peuvent l'être qu'après avoir été validés par le Conseil constitutionnel. C'est donc une position trompeuse, qui peut affirmer que le vainqueur de l'élection présidentielle ivoirienne est celui qui a été désigné en tant que tel par la CEI, sauf à reconstruire les principes classiques du droit constitutionnel en fonction des intérêts politiques ou géostratégiques".

À la suite de l'Union des Populations du Cameroun, tendance Mack-Kit, posons-nous cette question: pourquoi veut-on imposer par tous les moyens, même les plus suicidaires, aux ivoiriens un chef d'Etat pantin qui, comme dans de nombreux pays africains, va continuer à permettre l'exploitation séculaire des grandes richesses du pays, le blocage du développement des grandes potentialités qu'il recèle, et le maintien du Peuple et notamment la vaillante jeunesse ivoirienne dans la misère et la pauvreté ?


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