Friday, 22 July 2011

LA NAIVETÉ IVOIRIENNE: LE PARTI DE DIEU

Par SELI ZEGOU
Dix ans de pouvoir, cinq mois de crise post électorale. Disons le tout net. Nous avons été naïfs mais puisque les balles chargées de restaurer la démocratie nous ont épargnés, trouvons du temps pour revenir sur notre traumatisme collectif. Notre douloureuse introspection se poursuit avec la peine qui accompagne tous les voyages au fond de soi- on s’y découvre avec des mobiles et des masques intérieurs d’une laideur froide de film d’horreur. Cette descente vers notre monde intérieur est faite de rencontres avec toutes sortes de démons, de fantômes ou d’« atotoh » comme nous appelons ici ces gens qui, bien que censés être décédés, s’invitent dans nos funérailles ou dans le lit d’un hôtel de passe. Ah, que Dieu nous aide !

Dieu justement ! Est-ce maintenant qu’on l’a découvert ou a- t- on choisi de le mettre comme le célèbre bouillon de cuisine à toutes les sauces politiques du pays. Chez les vainqueurs comme chez les vaincus, Dieu déjà omniprésent par nature a été mis, pris, aperçu, perçu partout .Dans le faux pas d’un dirigeant politique lors d’un meeting. Dans le numéro d’une résolution des Nations Unies. Dans la forme des nuages en plein midi. Dans un motif en forme de cœur dans une marmite pleine de sauce graine. Glorieuse omniprésence !
La vie sociale en Eburnie ces dix dernières années a été caractérisée par une sorte de fondamentalisme œcuménique si l’on peut trouver quelque rationalité dans un tel attelage conceptuel. La présence de Dieu dans le quotidien des Africains est un fait banal .Ce qui est nouveau, c’est l’invasion du divin telle qu’elle est voulue par des croyants issus de toutes les persuasions du christianisme historique .Normalement, une telle exclusivité s’accompagne intrinsèquement d’exclusion des autres. Pas sous nos tristes tropiques !
Le fondamentalisme œcuménique dont il est question ici prêche une exclusivité de sa perception du divin et suppose, propose et….impose ,au cas échéant ,une acceptation sous réserve de châtiment divin de sa vision de l’avenir pour une vingtaine de millions d’animistes, bossonistes, athées, musulmans, chrétiens, membres de congrégations afro-ecclésiales, catholiques et protestants et….évangéliques . Surtout évangéliques ! La nature de tout fondamentalisme est d’exclure mais ici, il prend la forme non plus d’une foi populaire mais d’une religion populiste. La démographie nourrit la démocratie. Ne l’oublions plus jamais !
Tous ces membres du parti de Dieu se sont approprié promesses bibliques et prophéties idoines. Le parti de Dieu a unilatéralement décrété que ce pays est le pays béni de Dieu (si vous dites « des dieux », on vous tape sur les doigts) avec ce que cela implique comme conséquences politiques et économiques. Le parti de Dieu proclame dans la bouche d’un pontife que la Côte d’Ivoire est la deuxième patrie du Christ. Urbi et orbi ! D’autres prêcheurs moins puissants, dans les salles de classe et abris de fortune qui servent de lieux de culte, font le lien entre ce pays et l’Israël biblique ou même moderne. Alléluia ! Dix ans d’une fantastique foire des amalgames !

Pasteurs et dignitaires religieux rêvaient d’une théocratie dans laquelle ils prendraient enfin leur revanche au plan social ! Avec passeports de service et subventions dodues pour les « hommes de Dieu ». Sans oublier les « à coté » essentiels de terrains gratuits et d’incontournables consultations pour prendre les grandes décisions du pays ! Ce pays était, disaient ils, le pays de Dieu et si cela n’était pas clair, il n’était pas question qu’un étranger vienne le diriger ! C’était biblique, théologiquement correct et surtout le seul moyen pour la Côte d’Ivoire d’accomplir « sa destinée prophétique ».
Dix ans de naïveté institutionnelle et populaire. Dans les palais et les paillotes. Au sein du pouvoir et dans la plèbe. Sans s’interroger sur le regard que les « autres » portaient sur ce débordement de prosélytisme politico-religieux. Dix ans d’une ivresse spirituelle peut-être spiritiste de prophéties bidon, de proclamations dignes de la méthode Coué et de mépris de la nécessaire différence des autres qu’impose la notion moderne –et contestable-de laïcité de l’Etat.
Les Bleus ont été emportés par le tsunami des Bleus-Blancs-Rouges. Retour à la case départ. Des naïfs sont partis ; c’est le tour d’autres naïfs. Les habitants de la Case en sont sortis-grands vainqueurs de ce match de catch à trois. On rêve de voir disparaitre les pantalons taille basse et les bars climatisés .Et toutes ces musiques lubriques inventées par Gbagbo le Kafri…Le pays sera bien –hamdoulilah ! Et enfin l’on redonnera à l’éducation coranique sa valeur tout en légalisant la polygamie. A voix basse SVP- mais Incha ‘Allah toutes ces choses sont prévues pour rendre le pays vivable comme chez nos frères arabes.
Le parti de Dieu est parti. Le parti de Dieu est de retour. A ceux qui ne le sauraient pas, il existe ailleurs un autre groupement appelé Hezbollah ! Ce mot arabe signifie « le parti de Dieu ». Amina !

1 comment:

  1. Thank you kindly my friend,

    We, Africans have nothing to fear but " ourselve ". It is not how or when we'll get there, but the change in us that will make it easier for the almighty to do what we have asked of him. The end justifies the means, have hope.

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